Entretien avec Stéphane Allix: existe-il une vie après la mort?

Stéphane Allix : l’enquêteur des mystères

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Stéphane Allix nait en 1968. A 19 ans, il devient journaliste en rejoignant clandestinement, en 1988, les résistants afghans en lutte contre l’occupant soviétique. Pendant les années 90, il voyage à travers le monde, couvre plusieurs guerres, réalise des films, écrit des livres : La petite cuillère de Schéhérazade, sur la route de l’héroïne – Carnets afghans, avec son épouse Natacha Calestrémé – Afghanistan, Aux sources de la drogue –  Afghanistan, Visions d’un partisan.

Il cesse d’être reporter de guerre lorsque son frère de 30 ans, Thomas, meurt dans un accident de voiture en Afghanistan. Ce deuil sera le début d’un long questionnement et d’enquêtes sur l’hypothèse d’une vie après la mort.

A partir de 2003, il s’engage dans l’étude et la recherche sur les conséquences de la révolution scientifique en cours, avec une approche comparée de disciplines telles que la psychiatrie, la physique quantique, la biologique, l’astrophysique, ainsi que les expériences inexpliquées et les connaissances traditionnelles.

En 2007, il fonde l’Institut de recherche sur les expériences extraordinaires (INREES), consacré à l’étude des expériences humaines inhabituelles, telles que les expériences de mort imminente.

Stéphane Allix est également l’auteur et le réalisateur de la série de documentaires Enquêtes Extraordinaires diffusés sur M6 en 2010 et en 2013.

Ecrivain, il a récemment publié Le Test qui est devenu rapidement un bestseller. Son livre raconte une expérience : à la mort de son père en 2013, Stéphane Allix a placé des objets dans son cercueil. Il n’en a parlé à personne. Puis, il a interrogé des médiums qui disent communiquer avec les morts afin de les mettre à l’épreuve. Ont-ils découvert de quels objets il s’agissait ? C’était le test.

C’est suite à la lecture de ce livre que j’ai souhaité rencontrer son auteur.

Pourquoi cette rencontre ?

Pour moi qui, depuis toute petite, me posais de nombreuses questions – existentielles, philosophiques et même techniques – à ce sujet, j’ai eu le bonheur de trouver bon nombre de réponses et une bonne dose de réconfort dans cet ouvrage. Enfant, j’avais peur de la mort et du néant censé l’accompagner. Il y avait bien la religion et le prêtre du samedi soir qui nous parlait de la vie éternelle. Alors j’essayais de me rassurer avec ça et d’imaginer. Mais non, rien n’y faisait décidément. La vie éternelle ? Un truc sans fin ? Cette notion m’effrayait tout autant que le néant et me filait le même tournis que l’infinité de l’Univers. Tout était bien trop vaste, illimité, vertigineux, pour être représenté dans mon cerveau de petite fille.

Au fil du temps, j’ai fini par trouver des débuts de réponses et un peu d’apaisement à travers l’expérience de mort imminente que mon grand-père maternel m’avait confiée à l’âge de 13 ans, le témoignage d’autres « survivants », une conférence de Jean-Jacques Charbonnier,  le chamanisme… et « Le test ».

Cette conversation de novembre 2015, dans un bistro près du Panthéon, nous a amené à aborder plusieurs sujets. C’est cet enregistrement d’une heure que je vous retranscrirai ici, en plusieurs fois, à travers une série d’entretiens thématiques. Il y sera bien sûr question de l’hypothèse d’une vie après la mort, de quelques interrogations techniques sur la communication avec l’Au-delà, de cheminement pendant sa vie pour mieux se préparer à l’autre vie, d’expériences chamaniques troublantes et de l’importance de trouver sa raison d’être…

Je souhaite que vous preniez autant de plaisir à lire les propos de Stéphane Allix que j’en ai eu à les écouter.

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Premier entretien: Y’a-t-il une vie après la mort ? Faut-il attendre des preuves ?

Ce livre « Le Test » est-il la preuve que la vie après la mort existe ?

Le mot « preuve » est attaché à une démarche scientifique matérialiste reproductible qui ne s’adapte pas à cette analyse. C’est comme si on essayait d’analyser mathématiquement un concerto de Chopin. On pourrait faire toutes les observations qu’on veut, cela nous donnerait un certain nombre de résultats mais que percevrait-on de la créativité, de la beauté et de l’émotion, que suscite ce concerto ? Ce sont des domaines qui, dépassée une certaine limite, échappent à la science. Mon expérience auprès de médiums n’est pas une démarche scientifique. Mais, personnellement, après 15 années de recherches sur le sujet, elle a fini de me convaincre sur l’existence d’un au-delà.

La science a tout de même tenté de prouver l’existence d’un ailleurs ?

Ces phénomènes, qu’il s’agisse de mort imminente, de médiumnité etc. peuvent en effet être observés d’un point de vue scientifique. On peut se couper les cheveux en quatre pour les expliquer et formuler différentes hypothèses. C’est bien de faire ce travail là. C’est une bonne chose que les recherches sur la conscience soient envisagées. Par contre, ça implique un énorme changement de paradigme pour avoir des outils à la mesure du phénomène.  Sauf que pour l’instant on n’est pas encore dans ce changement de paradigme. On est dans un moment de transition, c’est-à-dire qu’on essaie d’analyser quelque chose qui est de l’ordre de la réalité de demain avec des outils d’hier. Forcément à un moment donné, ça coince, c’est insatisfaisant, frustrant.

Mais pour croire, les gens ont besoin de « preuves »…

Il y a des scientifiques, des para-psychologues qui depuis un siècle essaient de prouver par exemple l’existence de la télépathie. On a accumulé un nombre de données incroyable, des méta-analyses qui prouvent que cela existe, que c’est une réalité. Cela ne change rien. La majorité des gens disent  toujours « si ça existait, ça se saurait, on aurait des preuves ». Mais on a des preuves ! Cela montre que la preuve scientifique est une espèce d’objet fantasmé dans notre société. On a mis la science sur une sorte de piédestal  mais la science n’est pas La Vérité, elle n’est pas Dieu. C’est juste une méthodologie de questionnement. Il y en a d’autres que j’ai découverts depuis quelques années qui permettent également d’appréhender la réalité.

Lesquelles ?

L’amour par exemple. La relation amoureuse que j’ai avec ma femme n’est pas réductible à une expérience scientifique, pourtant cela nourrit ma vie au quotidien. Depuis quelques années, cela me rend meilleur, cela change la totalité de mon existence. Pour comprendre l’influence de ma vie amoureuse sur mon être et ma vie en général, il faut trouver d’autres outils. Ce peut être l’intuition, la littérature, la poésie etc. Il n’y a pas lieu ici de faire un calcul mathématique ou une analyse physicochimique.

Alors, il faut s’en remettre à nous-mêmes, nos ressentis, nos propres croyances, nos expériences?

Oui. Pour la question de la vie après la mort, l’approche scientifique a permis, par exemple, de prouver que les expériences de mort imminente ne sont pas des hallucinations. Mais ce qui serait intéressant pour un pays comme la France, marqué par sa tradition de cartésianisme, ce serait de parvenir à trouver un équilibre entre un vrai discernement scientifique et un esprit ouvert. On n’a pas besoin d’obtenir toujours des certitudes mais, au contraire, de laisser émerger  une position d’équilibre en chacun de nous, qui nous donne une stature plus adulte, plus apaisante, plus enrichissante pour notre quotidien. Cette ouverture d’esprit sur la mort nous permet de mieux accepter la perte de nos proches et la perspective de notre propre mort. Quand on parvient à être très apaisé dans l’accompagnement de fin de vie, comme ça m’est arrivé pour la mort de mon père et quand on devient curieux, pas impatient, juste curieux, de notre propre mort, finalement on a appris tout ce qu’on devait savoir sur la mort. C’est là où j’en suis arrivé aujourd’hui.

Cela signifie-t-il que vous n’avez plus peur de la mort aujourd’hui ?

A priori non. J’ai 47 ans, normalement je ne devrais pas mourir demain. Si j’étais malade et qu’on m’annonçait que je vais mourir dans 15 jours, je pense que je vous répondrais différemment. Je n’ai pas d’appréhension particulière, je ne suis pas impatient. Je suis juste curieux de cet événement car ce sera le couronnement de mon existence. Les premiers jours de ma mort seront colorés de tout ce que j’aurai développé durant ma vie. C’est pourquoi j’essaie au quotidien d’être vigilant sur mes émotions, mes pulsions, toutes ces choses que je ne contrôle pas et qui sont liées à des blessures, des mémoires. J’essaie au maximum de les mettre en lumière, de les comprendre, de les soigner. Pour être prêt le moment venu et ne pas en devenir esclave. Parce que les médiums mais aussi le Bardo dans le Bouddhisme, le Livre des morts tibétains et les différentes traditions chamaniques, disent tous que nos premiers pas dans la mort ressemblent à des premiers pas dans un rêve. Notre jus de cerveau, notre inconscient, les choses non réglées prennent plus d’importance dans nos rêves. Ce voyage dans un autre monde (comme le rêve), est aussi coloré par nos peurs et nos mémoires inconscientes. Plus on aura nettoyé notre inconscient de notre vivant, moins on aura de mauvaises surprises. Après, je ne veux pas donner un caractère trop noir ou trop inquiétant à la mort car on est aidé de l’autre côté. Au même titre que lorsqu’on arrive sur terre, on est attendu par la maman, le papa, les sages-femmes, les obstétriciens…  D’après ce que me disent les gens, on est également attendu de l’autre côté.

Justement avant, ma préférence allait vers une mort subite, pas violente mais soudaine. Quelque chose de vite fait, bien fait pour m’éviter la souffrance d’une longue maladie. Mais votre livre nous apprend que ce n’est pas la « meilleure » mort, le passage le moins douloureux.

C’est clair que pour quelqu’un qui ne s’est jamais intéressé à la vie après la mort, qui n’a jamais réfléchi à l’idée, le fait de mourir de manière très subite, dans un accident de voiture par exemple, va rendre ses premiers instants dans l’au-delà très confus. Il ne saura pas ce qui vient de se passer, ni où il est, ni même qu’il est mort peut-être. S’il pensait que la mort c’est la fin et qu’il se retrouve ailleurs mais vivant, sans savoir à quoi s’attendre, ce peut être très perturbant. Selon certains médiums, cet état de confusion peut durer longtemps. Pour ces personnes là, il vaut mieux en effet se préparer et envisager « l’après » dans un lit d’hôpital. L’accompagnement médical évite de plus en plus de trop souffrir. Par contre, pour moi qui pense à la mort régulièrement et qui l’envisage comme une continuité, même si je meurs soudainement dans un accident de voiture, je pense que j’aurai rapidement des éléments qui vont me permettre de comprendre ce qui m’arrive. C’est vrai que souvent quand on appréhende cette question là, ce qui ressort, c’est avant tout le désir de ne pas souffrir. C’est normal. J’aimerais vraiment être relié quand je vais mourir, être conscient, regarder autour et pouvoir participer à ce processus. J’espère que je serai en état de le faire.

Existe-il plusieurs niveaux d’existence dans l’au-delà ?

De l’autre côté, d’après les médiums, il semble y avoir plusieurs niveaux. Je n’y vois pas une connotation morale accompagnée d’une notion d’enfer et de paradis qui est une image très attachée à la culture chrétienne. En revanche, ces dispositions d’esprit qui sont les nôtres, nous permettent de travailler à nettoyer notre inconscient. Si on arrive dans l’au-delà en ayant fait le ménage des peurs, des mémoires, des fantasmes, on sera assez net avec ce qui est en train de se passer. Par contre, si on se moque complètement de la spiritualité, des casseroles que l’on trimballe, qu’on préfère être esclave de nos émotions et picoler plutôt que nettoyer, là on risque, non pas d’être jugé par les autres, mais d’être victime de ses pulsions.

Si je fais une sorte de synthèse de ce que les médiums m’ont rapporté et de ce que j’ai lu, il apparait que sur terre, on peut tous se côtoyer en ayant un niveau de spiritualité différent, qu’il s’agisse du Dalaï-lama et d’un terroriste mais que dans l’au-delà, nos dispositions et notre présence spirituelle va nous attribuer naturellement une « famille ».

Si ce n’est la science, qui nous renseigne sur ce qui se passe après ?

Les lamas tibétains qui ont développé la capacité d’aller dans ses autres univers et d’en revenir, les chamanes qui communiquent avec les esprits et même les médiums. En revanche, il ne faut pas essayer soi-même avec le spiritisme par exemple, d’interroger les esprits car on ne sait pas qui s’invite à la table. Ce peut être dangereux et les réponses ne seront pas valables.

 

Je vous invite à nous retrouver dans 15 jours pour un nouvel entretien avec Stéphane Allix. Il y sera question de communication avec l’au-delà…

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